L’Université d’été du MEDEF 2008, suite...
Le soleil et les esprits lumineux étaient aux rendez-vous...
La conférence débat : Du G8 au G13 ?
Il faut saluer ici la qualité de l’organisation et des intervenants pour leur connaissance pointue des sujets traités, leur remarquable esprit de synthèse et leur pédagogie.
Petit rappel : Le Groupe des huit, dit G8 est un groupe de discussion et de partenariat économique comprenant les huit pays parmi les plus puissants économiquement du monde : les États-Unis, le Japon, l'Allemagne, le Royaume-Uni, la France, l'Italie, le Canada, et la Russie. Ensemble, les pays du G8 représentent 61% de l'économie mondiale.
D’abord G6 à sa création en 1975, initiée par le Président Français Valéry Giscard d’Estaing, puis G7 (intégration du Canada en 1976), le groupe s’est élargi à la Russie en 1998 pour devenir le G8.
Plusieurs membres du G8, dont la France, plaident pour un élargissement du G8 pour inclure la Chine, l'Inde, le Brésil, le Mexique et l'Afrique du Sud. Ce qui deviendrait le G13.
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L’animateur a surtout voulu poser la problématique de l’intégration ou non de ces pays émergents dans un G13, en argumentant autour des possibles points de discordes : culture, langues, réglementations économiques différentes, problèmes politiques (pour les pays non démocratiques), droit du travail, etc.
L’Ambassadeur de Chine en France, Son Excellence Quan Kong (à gauche sur la photo ci-dessus) n’a pas manqué de réagir, avec beaucoup d’humour et de sagacité, sur le fondement même de cette réflexion. « Pour vous Français, il faut d’abord voir les points de discordes. Pardonnez-moi, mais en temps que Chinois, je ne vois pas les choses comme cela. Chez nous, quand on veut cultiver des pommes, on commence par planter un pommier. La première année, on ne se concentre que sur les pommes valables sorties de l’arbre. On ne perd pas notre temps à compter les branches mortes. En revanche, si on estime que le rendement est moyen, on plante un autre pommier. Et l’année suivante, encore un autre pommier. Au bout de trois ans, on commence à exporter les pommes ! »
Moralité tacite, mais entendue : « Ne perdez pas tant de temps à philosopher sur ce qui pourrait ne pas marcher et agissez plutôt, plantez et donnez vous du temps! ». Sacré leçon de pragmatisme et preuve s’il en fallait que l’évolution du monde du travail en France doit d’abord et surtout passer par un changement profond et radical de la mentalité des Français face au monde du travail. (Avis ouvertement partagé par Laurence Parisot, lors d'une autre pléinière, en présence du Premier Minstre tunisien...)***
Certes, avec dix pour cent de taux de croissance moyen depuis trente ans, la Chine, troisième pays du commerce mondial joue définitivement dans la cour des grands et les entreprises françaises l’ont bien compris. Le commerce sino-européen était de 306 milliards de dollars en 2007, avec 28000 entreprises françaises implantées sur le sol chinois. Une réussite exponentielle rapide et inespérée encore au début des années 70.
Du côté de ces nouveaux futurs géants, on pouvait sentir la volonté stratégique de la France, à travers son patronat, de créer un lien particulier avec l’Inde, le plus grand pays démocratique du monde, donnant de surcroît la part belle aux femmes. C’était bien sûr en omettant de parler du système des castes dans ce pays, qui ne donne l’accès à l’éducation primaires qu’aux enfants issues des familles les plus riches du pays. Mais là, c’est un autre débat…
Et l’Ambassadeur d’Inde, Son Excellence Ranjan Mathaï de se défendre d’un tel attrait pour son pays, soulevant avec diplomatie et perspicacité que « L’Inde ne voit pas la démocratie comme un sujet de discorde et les élites de la jeunesse indienne sont d’abord choisies pour leur efficacité et leur talent ».
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Au-delà des non dits diplomatiques et des retenus de bonne aloi, cette conférence de haut vol fut amplement couronnée par les précieuses et brillantes interventions de Christophe Jaffrelot, directeur du Ceri. Il souligna avec justesse que les questions de démocratie étaient plus un problème pour la Chine communiste que pour l’Inde.
Pour autant, le caractère non démocratique de la Chine n’a jamais eu d’incidence sur l’économie et le commerce avec ce pays.
Pour Christophe Jaffrelot, la question politique se pose surtout au niveau de la gouvernance d’un pays : sur le plan des investissements extérieurs, de l’entreprenariat et de la volonté d’accueil des marchés étrangers, pas sur qui votent les lois.
A ma gauche, Zachary Latif, économiste surdoué, trader de génie, qui a eu son bac à douze ans et fut notamment diplomé de la célèbre Harvard Business School à 18 - voir l'article qui lui est dédié sur le site du célèbre journal Britannique The Guardianhttp://www.guardian.co.uk/business/2008/apr/11/merrilllynch.banking
... et à ma droite Carl Lobo, de l'Université de Westminster.
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J’ajouterais, puisqu’il s’agit de « voir en grand », qu’aux Etats-Unis, depuis le 11 septembre 2001, la notion de démocratie est devenue binaire : elle est surtout en opposition avec les pays musulmans.
Pour les Américains, l’Inde (démocratique) peut être un allié de poids contre la Chine (communiste) voisine dans cette partie du globe.
Cette démonstration expose bien les ambitions géopolitiques globales d’une harmonisation politique par des réseaux socio-économiques.
En France, nous sommes plus fascinés par la Chine que par l’Inde. Les Américains, eux, considèrent l’Inde comme un allié démocratique de cette partie du monde et la Chine comme un allié économique. Ils ont des réflexes et des réflexions de super puissances. Pas nous.
Pour les Américains, l’Inde (démocratique) peut être un allié de poids contre la Chine (communiste) voisine dans cette partie du globe.
Cette démonstration expose bien les ambitions géopolitiques globales d’une harmonisation politique par des réseaux socio-économiques.
En France, nous sommes plus fascinés par la Chine que par l’Inde. Les Américains, eux, considèrent l’Inde comme un allié démocratique de cette partie du monde et la Chine comme un allié économique. Ils ont des réflexes et des réflexions de super puissances. Pas nous.
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Le Brésil n’est pas en reste dans l’émergence d’une valeur économique nouvelle et forte. Demetrio Bueno Carvalho, Ministre, Chef de la Section économique à l’Ambassade du Brésil en France n’a pas manqué de souligner la présence fructueuse de plus de 600 entreprises françaises au Brésil. Cette ouverte s’inscrit dans une volonté de développement d’une plateforme économique vers un marché plus grand, plus européen.
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Si les entreprises françaises restent dynamiques, la croissance française a baissé.
Faut-il alors avoir peur des puissances émergentes ?
La réponse est « non », selon Dominique Hériard-Dubreuil, Présidente du Conseil d’administration de Rémy-Cointreau. « Il faut au contraire profiter de la croissance de la Chine pour y investir et s’y développer ». Et de mettre en garde les entreprises françaises contre les divers écueils de la Chine : différences culturelles, contrefaçon, pillage des concepts français, barrière de la langue, avoir les bons contacts sur place… Selon elle, restons vigilants et fonçons en se donnant du temps !
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Pour en revenir au thème de la conférence « du G8 au G13 ? », les intervenants ont posé la question pertinente de savoir si le FMI et l’ONU sont prêts à s’ouvrir aux pays émergents.
Les représentants de l’Inde, de la Chine et du Brésil ont légitimement insisté sur l’importance d’y être présents, compte tenu d’une part de leur poids économiques et d’autre part, du fait que ces populations ne sont pas représentées dans cette organisation, dite « mondiale ».
Or, il est vrai que les Nations Unies et le Fond Monétaire International sont des institutions d’après deuxième guerre mondiale… Et les vieilles dames n’aiment pas être bousculées dans leurs habitudes. Pourtant, il est urgent que ces entités, sensées représenter toutes les nations évoluent ! Ne serait-ce que pour le maintien et la garantie de la paix dans le monde.
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La donne de l’économie mondiale est un train de changer de main : nous assistons à un basculement de l’économie mondiale. La croissance de l’Europe a baissé (excepté l’aigle Allemand) alors que les pays émergents ont largement développé leur croissance à la hausse.
On ne peut donc plus nier la nouvelle force de frappe économique de ces pays émergents, qui jouent indubitablement dans la cour des grands.
A quand la reconnaissance officielle ?
Depuis 1963, aucune réforme n’a été faite à l’ONU. Les pays émergents pourtant contribuent largement aux armées des casques bleus, mais n’ont toujours pas de représentants permanents siégeant à l’ONU, donc pas de voix !
Ouvrir le G8 au G13 pourrait être un début de réponse, afin de maintenir la démocratie à travers des liens économiques.
Si l’idée séduit le Brésil, deuxième exportateur agricole au monde, il n’en demeure pas moins que ce dernier ne souhaite pas qu’un tel élargissement se face au détriment des organisations unilatérales existantes. Il peut s’inscrire, en revanche, en complément de celles-ci.
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La mondialisation s’est construite en 25 ans.
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La mondialisation s’est construite en 25 ans.
En 1868, le PIB de la France était égal à celui des Etats-Unis !
No comment.
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Aujourd’hui, nous sommes dans un monde interdépendant et multipolaire.
Si les institutions, telles que le G8, le FMI ou l’ONU ne prennent pas en compte, officiellement et légalement cette réalité, leur crédibilité et même leur légitimité s’en trouveront contestées.
C’est déjà que le cas, par certains membres de l’OPEP (l'Organisation des pays exportateurs de pétrole), qui reprochent par exemple qu’aucune institution arabe n’y soit représentée ?
Jacques Delors avait déjà suggéré un système de veille et de sécurité économique, repris par Hubert Védrine, lorsqu’il était Ministre des Affaires Etrangères, sous la Présidence de François Mitterrand...
La conclusion de cette conférence restant ouverte à l’appréciation des auditeurs, forts de tous ces témoignages pertinents et de ses débats enrichissants, voici mon avis :
Plutôt que de plancher sur un potentiel élargissement d’un G8 à un G13, qui avouons-le, n’est pas très puissant dans les faits...
Pourquoi ne pas créer une institution nouvelle, plus ouverte et mieux structurée, qui aurait un réel impact sur la régulation et l’harmonisation de l’économie mondiale ?
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